Des femmes guinéennes casseuses de pierres autrement appelées concasseuses, ont été reconverties ce vendredi 29 juin en agricultrices, à Sonfonia Lac dans la commune de Ratoma. Un projet réalisé par le Réseau guinéen des femmes de l’artisanat REGUIFA, accompagné par le consulat de Suisse en Guinée.
Ce projet en faveur des femmes concasseuses des blocs de pierres en Guinée, est une idée venue à l’issue d’une rencontre du président de la république et des artisans de Guinée.
Hadja Djenaba Keita est la présidente du REGUIFA, « je les ai reconverti parce qu’une fois nous sommes allés à la présidence et j’ai parlé d’elles en rappelant qu’elles souffrent. Le président était surpris, il a dit que ce n’était pas un métier de femme, il nous a demandé d’essayer de les reconvertir soit dans le maraîchage ou dans l’agriculture. Il a indiqué que le concassage des roches ne peut pas être une activité génératrice de revenue pour les femmes. C’est une pratique qui assure péniblement les charges familiales, avec une courte chaîne de valeur. REGUIFA ayant remarqué cette réalité, a décidé de reconvertir ces femmes concasseuses en agricultrices. »
Accompagnée techniquement et financièrement par l’ambassade de Suisse à travers son consulat général, pour une durée de deux ans, Mme Keita a donc reconverti quelques femmes de Conakry, notamment celles de Sonfonia Lac. Elle compte reconvertir toutes les concasseuses du pays, parce qu’elle a constaté que « même à l’intérieur, les femmes veulent faire de ça un métier puisque j’ai vu des femmes concasseuses dans plusieurs préfectures. Je souhaite que le projet s’élargisse jusqu’à l’intérieur du pays. Car ce n’est pas un métier de femme, ça les détruit, ça les déforme, tout ce qu’elles gagnent rentre dans les soins médicaux. Elles peuvent facilement avoir la tuberculose à cause de la poussière. »
Ngadi Soumah, coordinatrice des plaines de Sonfonia dit être ravie d’accueillir ses sœurs. « Nous sommes contentes, contentes parce que si tu cultives c’est pout toi tu ne donnes pas à quelqu’un. Le concassage n’est pas un travail des femmes, donc elles sont bienvenues parmi nous, qu’elles viennent cultiver avec nous ici ».
Mamasta Camara responsable des concasseuses, est excitée à l’idée d’abandonner les pierres pour la terre. « Le fait de venir ici est mieux pour nous. Nous avons su que casser les pierres n’est pas bon pour nous. Si nous avions le choix on n’allait pas faire le concassage. Nos maris ne travaillent pas, nous avons des enfants, c’est ce qui nous a poussé à le faire, si non ce n’est pas notre boulot. Mais comme nous avons eu une opportunité, nous allons venir travailler la terre. C’est vrai qu’on gagnait notre vie avec le concassage, nous subvenions aux besoins de nos enfants, ici aussi nous pouvons gagner afin de continuer à aider nos familles ».
Sur un domaine de 20 hectares octroyé par le ministère de l’agriculture au bord d’un lac, ces femmes cultivent le gombo, la patate, l’aubergine, le piment, le haricot, le riz et autres, pendant toutes les saisons, et le revenu leur appartient.
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Présentes à la cérémonie, les représentantes du ministère de l’action sociale de la promotion de la femme et celle du consulat de Suisse se sont exprimées. « Nous souhaitons du succès au projet », dixit Mme Kourouma secrétaire générale du ministère de l’action sociale de la promotion de la femme, après avoir rappelé les actes posés par le gouvernement en faveur des femmes rurales et urbaines.
Mme Diallo Diéhé assistante du consul général honoraire de Suisse, affirme que, « travailler dans les carrières n’est pas une activité dégradante mais c’est une activité pénible. Vous bénéficierez donc d’un programme d’accompagnement pour deux ans, » a-t-elle promis.
Des poèmes ont été déclamés par des jeunes filles qui s’exprimaient en tant que concasseuses et agricultrices, en invitant les unes à rejoindre les autres tout en s’acceptant. Et du matériel a été remis aux femmes désormais agricultrices, pour mieux cultiver.
L’organisatrice, présidente du REGUIFA, remercie le partenaire puis promet que les femmes en feront bon usage. Elle profite de l’occasion pour demander à d’autres institutions, une aide en faveur de cette couche vulnérable socioprofessionnelle, afin de les débarrasser totalement de ces durs travaux de concassage.
Pour savoir si ces femmes ne seront pas délogées, Hadja Djenaba Keita nous rassure que ce site offert aux femmes ne sera pas revendu un jour, comme tous les autres terrains de Conakry, devenus des habitations aujourd’hui.
Aminata Diallo