Mardi 04 avril 2023, le Tribunal de Première Instance de Mafanco a rendu justice à M’mah Sylla qui est décédée après avoir été violée et charcutée par des médecins, en 2021 à Conakry. Une grande victoire pour les féministes, activistes et l’avocate de la victime.
Kadiatou Konaté, Directrice Exécutive du Club des Jeunes Filles leaders de Guinée, estime que cette affaire est une avancée. « Sincèrement en matière de justice, c’est quand même une avancée significative. Surtout quand on entend le verdict rendu et l’effort fourni par les organisations, ainsi que l’avocate maître Halimatou Camara, qui a tout donné pour pouvoir arriver là où nous sommes aujourd’hui. Donc c’est vraiment très très salutaire, parce que nous savons habituellement que les dossiers traînent en justice. L’idéal c’est vraiment que ça continue comme ça avec les autres dossiers. » Dit-elle.
Djenabou Diallo, présidente de L’ONG Mon Enfant Ma Vie, qui a tout donné pour ce cas de M’Mah Sylla, est plus que soulagée. « C’est un soulagement que le procès ait pu déjà se tenir, que M’mah Sylla soit reconnue comme une victime et que ces bourreaux soient reconnus coupables, c’est un ouf de soulagement et une belle victoire de la justice en Guinée. Je suis soulagée, j’aurais aimé qu’il y ait plus de sanctions. »
Hassatou Lamarana Bah, responsable à l’organisation de la structure Les Amazones de la Presse Guinéenne et fondatrice du site actualité féminine, rejoint les autres féministes. « Ce procès est une grande avancée dans la promotion des droits de la femme. Il y a eu beaucoup des dénonciations sur ce cas M’Mah Sylla, jusqu’à ce qu’elle a perdu la vie et nous avons continué les dénonciations. J’espère que les autres cas aussi vont être jugés, que le ministère de la justice se donnera à fond pour sanctionner les auteurs à la hauteur de leurs forfaitures. En tout cas, ça nous encourage nous les activistes à dénoncer davantage ce qui se passe. Parce que là nous voyons qu’il y’a une suite favorable. Ça fait très mal au cœur quand on dénonce et que la justice ne fait rien. »
Quant à l’avocate de M’mah Sylla, qui a connu des hauts et des bas dans cette affaire mais n’a jamais baissé les bras, elle reste satisfaite de cette décision. « Je pense qu’à minima c’est une décision qui est satisfaisante. Satisfaisante dans la mesure où c’est quand même des peines qui sont lourdes, qui ont été infligées à certains parmi les inculpés dans cette affaire. Cette décision est également historique, dans la mesure où elle vient mettre à nu un certain nombre de difficultés dans notre société, les questions de viols. Mais la gravité de cette affaire est relative au fait que c’est le viol en milieu médical, c’est extrêmement grave. L’autre chose, ce sont les avortements clandestins dont sont exposées les jeunes femmes dans notre pays, ça vient mettre en lumière le fait que non seulement les jeunes femmes sont en difficulté et quand elles veulent pratiquer un avortement dans ces conditions, elles deviennent des victimes vulnérables devant ces personnes qui pratiquent l’avortement illégal. La troisième difficulté de ce dossier, c’est également les questions de prise en charge, de compétences, de déontologie, dans l’exercice de la médecine. » Dit-elle avant de continuer en ces termes.
« Nous attendons les effets de cette décision, qui font qu’il faut revoir les compétences dans notre pays, dans le domaine de l’exercice médical. Il faut revoir les formations des violences basées sur le genre, dans ce domaine et ce secteur, surtout les professionnels de la santé. Mais également il faut nécessairement des effets de l’organisation de l’ordre des médecins dans notre pays, des effets de la gestion du ministère de la santé quant à l’exercice illégal de la médecine, quant au minimum de prise en charge médicale, quant à l’exercice légal de la médecine. Le chemin est assez long parce qu’il y a moins d’un an, un cas un peu similaire s’est produit et les médecins ont été relaxés par le tribunal de première instance de Dubreka. Nous espérons que les juges d’appel vont venir conforter cette décision. » Affirme maitre Halimatou Camara.
Le verdict de l’affaire M’Mah Sylla est de un à 20 ans de prison. 1 an pour le médecin complice qui avait réopéré M’mah Sylla, 15 ans pour les médecins violeurs, 20 ans pour le médecin fugitif et 1 milliard de fg qui sera déversé au père de la victime.
Idiatou Bella Diallo